Le dialogue des spiritualités pour mieux faire société.
« Comment les spiritualités et le dialogue entre elles peuvent être mis au service du bien commun ? »
« Il s’agit de témoigner que dans notre pays, bien que l’élément religieux ne soit pas la référence pour la majorité de nos contemporains, il y a une dette de sens, des réponses à donner aux problématiques de notre société contemporaine que nous puisons dans la sagesse de nos traditions religieuses. »
- Ghaleb BENCHEIKH, président de CMRP-France
- Henri FOUCARD, co-secrétaire général de CMRP-France
- Présentation du chantier "Spiritualité (s) : archipel ou bien commun" par Michel RAY
- Ateliers partages d'expériences
- Assemblée générale statutaire
- Conférence/table-ronde : « Le dialogue des spiritualités pour faire mieux société »
- Frédéric Rochet / Forum 104
- Michel RAY, administrateur de Démocratie et Spiritualité (D&S)
- Ghaleb BENCHEIKH, président de CMRP-France
- Echanges avec la salle
- Conclusion de la journée
Au titre de cette journée « Le dialogue des spiritualités pour mieux faire société », on pourrait ajouter des sous-titres :
- « La contribution des spiritualités pour mieux faire société. »,
- « Le dialogue interreligieux et spirituel face aux défis actuels »,
- « Discerner les biens communs spirituels pour mieux faire société ».
Clairement ce dialogue n’est pas un dialogue dans le vide, il est au service de la société, du bien commun, et la spiritualité fait partie de nos biens communs.
Ce dialogue bénéficie de deux dynamiques associées, dans le cadre du chantier interconvictionnel « Spiritualité(s) : archipel ou bien commun ?» :
- Dynamique du Forum104 : d’un lieu où les gens se croisent à un lieu où les gens se rencontrent.
- Dynamique de Démocratie & Spiritualité (D&S) avec sa charte exprimant un engagement en quatre dimensions.
- S’efforcer de vivre de façon authentique et simple, en cohérence avec les exigences de son chemin intérieur. Cela peut être facilité par l’adoption d’une règle de vie personnelle, comportant à la fois travail sur soi, écoute de l’autre et partage avec les plus faibles.
- Apprendre à connaître et respecter les autres formes d’expériences et de spiritualité que la sienne et faire de ce dialogue un support de son propre cheminement.
- Participer, sous une forme ou sous une autre, à l’élaboration d’analyses et de propositions sur les sujets qui interrogent la relation entre démocratie et spiritualité.
- Soutenir ou promouvoir, dans son activité professionnelle ou civique, des actions concrètes reposant sur une inspiration éthique ou spirituelle.
Dans le contexte CMRP-France et dans la suite des Assises du 3 mars 2024 , ce sujet est pertinent :
« Comment les spiritualités et le dialogue entre elles peuvent être mis au service du bien commun ? ».
Comme le rappelait Ghaleb BENCHEIKH, président de CMRP-France, en conclusion des Assises du 3 mars 2024 : « Il s’agit de témoigner que dans notre pays, bien que l’élément religieux ne soit pas la référence pour la majorité de nos contemporains, il y a une dette de sens, des réponses à donner aux problématiques de notre société contemporaine que nous puisons dans la sagesse de nos traditions religieuses. »
Ghaleb BENCHEIKH, président de CMRP-France
Ghaleb se réjouit qu’après plusieurs rencontres en visioconférence, nous
puissions nous retrouver en présentiel. Selon notre habitude, nous mettons
d’abord nos rencontres sous les hospices divins : Ghaleb nous invite à un
temps de recueillement avant de démarrer nos travaux. A chacun d’implorer
sa transcendance, son Dieu…

Ghaleb introduit ensuite la journée. Michel RAY présentera l’expérience
heureuse, édifiante et nécessaire dans notre société, de D&S. Suivra un atelier
de partage d’expériences (trois groupes constitués), puis l’Assemblée
générale statutaire de CMRP-France. L’après-midi sera consacrée à la
conférence-table ronde publique
Henri FOUCARD, co-secrétaire général de CMRP-France

Henri donne des précisions sur des mots significatifs dans le titre (ou les sous-titres) de
notre journée.
Henri ressent la spiritualité comme traduisant une aspiration commune (à la paix, à la
transformation vers davantage d’humanisme et de bonté) de connexion au divin (sens de
la transcendance, au travers d’une religion, d’une éthique, en dépassant ce qui est
conditionné) avec une quête de sens (morale, sagesse, plus grande conscience).
Henri cite Abdennour Bidar, pour qui la spiritualité c’est l’œil du cœur (عين القلب), avec
sans doute les deux sens du mot عين (aïn) : l’œil (« voir avec le cœur ») et la source (la spiritualité vient du cœur).
Henri cite aussi Jean-Baptiste de Foucault, pour qui la vie spirituelle, c’est à la fois
- le travail spirituel sur soi-même ;
- la relation avec une communauté de pairs (échanges en confiance) ;
- le rattachement à une tradition (stimulation, liturgie) ;
- l’ouverture et l’intérêt pour les autres traditions.
Henri liste les biens communs de l’humanité :
- ceux reconnus comme conditions matérielles nécessaires à une vie digne de l’individu (l’eau, la nourriture, le logement, les soins médicaux) ;
- ceux nécessaires à l’épanouissement de cet individu (l’éducation, la culture, la formation et l’emploi) ;
- ceux nécessaires à la pérennité de la société (la vie et la mort de façon naturelle pour respecter l’écologie humaine, un environnement préservé, un cadre de vie sécurisé) ;
- la spiritualité issue de textes fondateurs, de témoignages de personnes rencontrées, de pratiques d’expériences (amour reçu et donné, temps de prière), de la contemplation (de la nature, de la personne humaine, de la banalité du bien).
Ces biens communs devraient être à la disposition de tous, ce qui n’est déjà pas le cas aujourd’hui de par le monde. Pour ce qui est de la spiritualité, la question est de savoir comment cette « ressource spiritualité » permet une transformation collective (au niveau de l’ONU, des États, des entreprises …).
Il s’agit de faire société au moment où « la démocratie n’est plus une évidence ». Mais comment cette spiritualité est-elle une ressource pour faire société ?
Henri a apprécié la métaphore de la langue par rapport à la religion et la culture (Métaphore citée par Jean Mouttapa lors du colloque-action du 1/1/2025) :
- la langue est imposée (langue maternelle) ;
- la langue me permet d’exposer mes voies singulières, mais il y a de l’intraduisible ;
- une langue unique (l’espéranto) n’a jamais marché.
Il faut oser aller suffisamment loin pour connaître la spiritualité de l’autre, en assumant la conflictualité des convictions et les profils sociaux différents, sources de difficultés du vivre ensemble en France.
Le dialogue interreligieux renforce l’empathie, la compassion envers l’autre quelque soit sa religion. Et chacun regrette la sanctuarisation de l’école (au nom de la laïcité) qui empêche de préparer les jeunes à vivre une spiritualité. Au nom d’une laïcité mal comprise, les jeunes sont privés de leurs droits spirituels et l’individu est réduit au rôle d' »animal économique ».
Enfin CMRP-France, avec ses groupes locaux, croit à la dynamique de l’ancrage local qui renforce le sentiment d’appartenance.
Présentation du chantier « Spiritualité (s) : archipel ou bien commun » par Michel RAY
Michel RAY, administrateur de D&S, nous rend compte de deux ans d’expérience au sein de ce chantier « Spiritualité (s) : archipel ou bien commun » coorganisé par le Forum104 et Démocratie&Spiritualité.
Le rassemblement de volontaires pour ce chantier, dans le cadre du processus de dialogue interconvictionnel, est parti des trois constats suivants.
- De grands défis actuels, nombreux et complexes (le changement climatique, l’écologie, la volonté de toute puissance des grandes puissances, etc ), qui s’ajoutent aux défis plus classiques de l’humanité (égoïsme et hubris de l’homme), nous préoccupent de plus en plus (crise de sens).
- L’évolution de notre vivre ensemble pose de plus en plus question. Le baromètre de la fraternité mesure d’année en année cette évolution. Plusieurs types de diversité sont exploités aujourd’hui pour développer des peurs alors qu’elles pourraient être une source de richesse pour tous. L’ouverture à l’autre est nécessaire et justifie un vrai investissement personnel.
- Les spiritualités présentent des signes d’archipel en divergence et sont instrumentalisées. Il y a aussi des divergences dans une même tradition spirituelle (traditionalistes, progressistes). En plus des dérives sectaires (manipulations, emprise), des instrumentalisations idéologiques, nous devons faire face à une marchandisation de la spiritualité.
La question centrale a donc été : « Comment transformer nos diversités en richesses pour tous ? ».
Le directeur du Forum104, Frédéric ROCHET, a initié une demande de partenariat auprès de D&S, fin 2022, pour l’animation d’un chantier transversal entre des personnes en responsabilité des structures adhérentes (300 structures sont adhérentes du Forum104.)
La question a été formulée ainsi : « Face aux besoins de sens dans notre propre intériorité et à toutes les échelles des communautés humaines, les spiritualités, mais aussi l’humanisme, l’éthique, les religions seront-elles au rendez-vous à la hauteur des enjeux ? Dans le périmètre interconvictionnel (celui de D&S et du Forum104), il s’agit de développer un esprit commun face au défi commun. Comment toutes ces réflexions peuvent-elles se transformer en actions ? Que pouvons-nous faire concrètement ensemble ? ».
Un « chantier » a été lancé, mais pas seulement limité aux personnes en responsabilité des structures adhérentes du Forum104. Il s’adresse aussi à toute organisation intéressée par le sujet, et à toutes les personnes dont l’engagement professionnel ou associatif poursuit la création de ponts entre spiritualités comme catalyseur pour le mieux vivre ensemble.
En mars 2023, à l’issue d’une soirée ayant rassemblé 50 personnes au sein du Forum104, un collectif de 20 personnes s’est constitué avec des diversités significatives (8 traditions spirituelles différentes étaient représentées, équilibre homme-femme, …) ; un deuxième cercle de 15 personnes a expliqué qu’il ne pouvait participer (manque de temps, autres engagements) mais qu’il soutenait la démarche, suivrait les comptes-rendus et pourrait apporter un témoignage ponctuel.
Ce chantier est un laboratoire d’expérimentation, à l’écoute du monde d’aujourd’hui (interviews de nos contemporains). Trois groupes de sept personnes ont été constitués, ainsi qu’un groupe d’animation. Les réunions des groupes ont eu lieu en présentiel : les trois dimensions humaines (le corps, le rationnel, le spirituel) ont pu ainsi interagir « pour de vrai ». Il y a eu aussi deux séminaires communs à tout le collectif.
Enfin la présentation des résultats du chantier le 1er février 2025 a réuni 70 personnes.
Un cadre était indispensable pour ce chantier :
- le manifeste du Forum104 qui insiste sur le respect, la bienveillance, la qualité de l’écoute ;
- les enjeux qui nous rassemblent font que nous avons besoin d’être foncièrement constructifs (l’objectif n’est pas de faire des sujets théoriques de controverses).
Le mot « chantier » a été choisi pour montrer l’objectif de « construire » ensemble quelque chose d’utile, au service d’une communauté ouverte.
Quelle spécificité pour ce chantier ?
- La quête de sens nous rassemble.
- Le dialogue interconvictionnel nous motive, et pas simplement dans une qualité de relation « polie » (Relation du style «Je te laisse tranquille, tu me laisses tranquille et on continue à faire quelque chose ensemble ».)
- L’expérience des « questions croisées » (« Tu m’as dit que dans le cœur de ta foi, il y a tel mot, c’est un mot que je ne comprends pas, pourrais-tu m’aider à le comprendre ? »…est un catalyseur pour dépasser le caractère « poli » de la relation.) Elle permet un vrai échange spirituel.
- L’authenticité est importante (elle ne suffit pas mais est nécessaire.)
Nous n’avons pas d’objectif de perfection, ni d’exhaustivité mais nous travaillons en réseau ouvert (avec des universitaires, des personnes très engagées sur le terrain).
Cette « construction » a été patiente, faite d’échanges notés avec soin. Des propositions d’outils pour faciliter le dialogue interconvictionnel, ont été produites par le chantier sur la base de notre expérience. Trois thèmes complémentaires ont été approfondis (chacun par un des trois groupes qui ont fait 12 réunions mensuelles de 3h) en veillant à ne pas tomber dans le syncrétisme ( car la diversité n’est pas réductrice).
- Quelles ressources spirituelles face aux défis actuels ? A partir d’un regard lucide sur les défis actuels, et les peurs qui paralysent, notre ressenti fraternel de la clameur de la terre et de l’humanité aide à identifier intérieurement les pertes de sens et stimule la recherche commune de sens. Michel cite le témoignage ( venant d’un autre groupe mais sur la même thématique ) d’une visiteuse de prison dont le défi était de tenir debout face à la violence à partir des ressources spirituelles de sa tradition, les autres membres du groupe apportant dans l’échange les apports de leurs propres tradition face à ce défi concret (Cette personne a rédigé un témoignage de 14 pages ! Cf. aussi le texte de Catherine Collin, pages 33 à 56 du livre coordonné par Michel RAY « Des raisons d’espérer »).
Ce groupe a identifié les grands défis actuels et les a regroupés en grandes familles, pour permettre un regard sur les pertes de sens correspondantes (et sur les mécanismes qui aujourd’hui créent ces pertes de sens). Ce groupe a échangé sur les ressources spirituelles telles que chacun les vit. Un dossier complet a été constitué, mis sur un drive Google. Le lien vers ce drive du chantier peut être transmis à des personnes intéressées à travailler sur le sujet (avec l’engagement de ne pas publier ce lien sur les réseaux sociaux). - Quels mots pour dire le spirituel aujourd’hui ? Les mots personnels sont essentiels pour un processus de mutation (Michel rappelle l’importance de mettre des mots pour dire ses souffrances – cf. Marie CARDINAL – Les mots pour le dire). Des interviews ont été réalisées. Il y a des mots piège, des mots à double sens (Le double sens n’est pas un hasard. C’est que dans l’âme humaine ce double sens existe), des mots émergents. Il existe aussi une allergie au mot « spiritualité » qui bloque le dialogue, que faire alors ?
- Spiritualité : un bien commun ? Quelles conséquences, ici et maintenant ? Quel recul prendre pour voir émerger des convergences entre deux spiritualités sans syncrétisme ? Un bien commun durable, partageable, transmissible ? Savoir aussi ce qu’on entend par spiritualité : une attirance vers plus grand que soi, un engagement de l’humain, une expérience personnelle de vie spirituelle ? Voit-on la vie spirituelle comme un élément essentiel à l’atteinte du bien commun ? Le deuxième cercle (Jean-Baptiste de Foucault, Daniel Lenoir, Eric Vinson) a également apporté sa contribution et a produit des textes.
On peut noter
- qu’un groupe à travaillé sur la question «La spiritualité est-elle un bien commun ? », mais que les deux autres groupes ont vécu dans leur échange ce fait que la spiritualité est un bien commun ;
- que la richesse des témoignages personnels est importante (ils ont été recueillis), il ne s’agissait pas de faire simplement une synthèse, voire du syncrétisme.
Michel conclut en expliquant que des outils seront présentés dans la séance de l’après-midi. On y réfléchira à quelles actions lancer en commun, entre CMRP-France et ce chantier.
Ghaleb donne alors la parole à la salle et aux personnes présentes à distance.
Question : Quelle a été la source du lancement de ce chantier ?
R. (Michel). Il y a à l’intérieur du Forum104 une dynamique ayant rassemblé des responsables des structures du Forum104, qui ont passé un an (12 réunions) pour réfléchir ensemble, sachant que ce dialogue interconvictionnel nécessite une continuité. L’interaction avec l’extérieur s’est faite, soit sous forme d’interviews faites par ces responsables, soit après, à travers le colloque du 1/1/2025 ayant servi à rendre compte. Il y a eu une ouverture, mais aussi un respect du temps d’intériorité.
Question : Comment avoir accès à la synthèse du colloque ?
R. (Michel). Toutes les personnes intéressés peuvent avoir accès dans sa complétude à la production du
chantier (lien cité plus haut), et par ailleurs le « dossier des participants » distribué le 1er février donne une synthèse (en 10 lignes environ) pour chacun des groupes de travail, chacun des outils proposés et chacune des actions proposées. Les 70 participants au colloque-action du 1/02/2025 , ont reçu le compte-rendu des 17 ateliers, la synthèse des questionnaires d’évaluation de la journée, etc. Cette communauté est ouverte. Pour ceux qui sont intéressés, il suffit d’envoyer son adresse mail à Michel pour devenir destinataire de cette information régulière.
Question : Quel est le lien entre ce chantier et l’ouvrage « Des raisons d’espérer » ?
R. (Michel). Toute chose a un historique. En 2015 (suite aux attentats), il y a eu une crise de confiance.
Beaucoup de personnes se sont demandé ce qu’elles pouvaient faire et des initiatives ont été lancées. Trois groupes de travail ont démarré en 2018, l’un à Saint-Merry, l’autre en milieu complètement interconvictionnel, le troisième à D&S qui se sont posé cette même question : « Quelles ressources spirituelles face aux défis actuels ? ». Le livre Des raisons d’espérer est le résultat de ces trois groupes. Ce livre nous a encouragés à lancer cette proposition du chantier au Forum104. Il y a une complète cohérence de fond entre les deux démarches, mais dans des cadres très différents.
Ateliers partages d’expériences
Trois groupes ont été constitués, deux parmi les présents au Forum104 et un troisième groupe avec les personnes connectés à distance.

Des comptes-rendus de ces trois partages ont été présentés oralement en début d’après-midi
: atelier 1, atelier 2 et atelier 3 en visioconférence
Assemblée générale statutaire
Les rapports présentés en assemblée générale (rapport moral, rapport financier, rapport d’activité) ont été votés à l’unanimité.
Rapport sur le site web religionspourlapaix.fr : ce site, créé en l’an 2000, a été entièrement réécrit en 2024 (mise en service de cette nouvelle version en décembre 2024).
Le but de notre site web est double :
- mettre à la disposition de tout public des informations sur le dialogue interreligieux, national ou local, en particulier par les annonces que les groupes régionaux nous transmettent sur leurs activités,
- permettre des liens entre les groupes régionaux, avec l’échange d’expériences, d’initiatives, etc. Ce qui a été fait en petits groupes ce matin. Le site veut formaliser et prolonger ces échanges. Pour cela, il est indispensable que les possibilités de contacts soient faciles à trouver. Donc, il est important que les différents groupes nous adressent tous les éléments qui peuvent être utiles ( nom et moyen de joindre les responsables) et les annonces de leurs manifestations, bien sûr.
Le site monte en puissance régulièrement. Même si ce n’est pas notre but.
Il faut noter que l’article le plus visité est le calendrier interreligieux mensuel, comme pendant toutes les années passées.
Nous avons aussi ajouté une possibilité, pour les visiteurs, de demander à recevoir les nouveaux articles publiés.
Enfin, nous avons installé un lien avec notre site Facebook et nous avons constaté que cela nous amène un nombre croissant de visites du site web.
Dans le cadre de cette assemblée générale, tous les candidats au Conseil d’administration ont été élus ou réélus.
Un compte-rendu de l’Assemblée générale sera publié.
Conférence/table-ronde : « Le dialogue des spiritualités
pour faire mieux société »

Cette table ronde a été animée par Hamdam NADAFI, directrice du Bureau des affaires extérieures des Bahá’is de France.
L’assistance était de 26 personnes sur place et 8 en visioconférence
Frédéric Rochet / Forum 104

Frédéric ROCHET, directeur du Forum104, nous présente ce lieu, sa raison d’être et ce qui s’y vit. On évoque souvent l’ouverture à la spiritualité du Forum104, qui est réelle, mais on oublie souvent de parler de l’expérience sociale qui s’y vit également. Le Forum104, c’est près de 300 structures adhérentes qui œuvrent dans le champ du développement personnel, de la spiritualité, de la recherche du bien commun.
Le Forum104 agit donc comme un « creuset social (melting pot) », en tissant des ponts, en créant des liens qui profitent à tous, dans ce lieu où nous recherchons, nous désirons la diversité. Comment la spiritualité peut elle nourrir cette construction du commun ? Mais pour certains la spiritualité pourrait amplifier le mouvement de fracturation à l’œuvre (archipélisation) !
Tous les ans le Forum104 rassemble les structures adhérentes (il y en a près de 300) autour d’un certain nombre de sujets identifiés comme étant des thèmes possibles de travail en commun. Par rapport à cette question de la spiritualité et du bien commun le Forum104 a eu la chance de pouvoir s’appuyer sur D&S.
Depuis deux ans, une quarantaine de structures adhérentes sont impliquées sur ce thème, soit dans un noyau dur, soit dans un « second cercle ». L’idée est que ce travail puisse aussi s’élargir à d’autres structures à l’extérieur (non encore adhérentes).
Nous avons besoin d’un supplément d’âme pour pouvoir vivre ensemble. Frédéric cite le père Louis-Joseph LEBRET évoquant le « bien commun spirituel » : « c’est le potentiel de l’intelligence, de la compréhension scientifique, de la sagesse et des compétences sociales, des traditions intellectuelles, morales, artistiques et pédagogiques, le potentiel des chefs-d’œuvre matériels de l’humanité et de ses institutions, c’est la culture, l’humanisme, tout cela mène à un destin éternel, en fait Dieu est le bien commun absolu et transcendant pour tous les êtres humains, tout comme Dieu est leur origine et leur aboutissement. ».
Question : le Forum104 a-t-il retrouvé son niveau d’activité d’avant le Covid ?
R. (Frédéric) Oui largement. Nous avons beaucoup de demandes, avec ce besoin de rejoindre ce projet qu’est le Forum, de se nourrir d’autres dynamiques que la leur. Nous cherchons à maintenir cette diversité dans la maison. Au cours des années nous avons accueilli beaucoup de spiritualités hors appartenance religieuse, c’est pour nous important que les religions reprennent leur place au sein du Forum.
Michel RAY, administrateur de Démocratie et Spiritualité (D&S)

Michel commence par résumer ce qui a été dit le matin (cf. plus haut) pour ceux qui ont seulement rejoint la conférence publique de l’après-midi.
Michel rend compte aujourd’hui à CMRP-France des travaux du chantier « Spiritualité (s) : archipel ou bien commun », comme cela a été fait lors du Colloque-action du 1er février 20251, et sachant que dans l’assistance cinq personnes ont participé à la journée du 1er février. Michel et Hamdam étaient coanimateurs de l’aventure passionnante de ce chantier qui a duré 18 mois.
Les défis ne se résolvant pas facilement aujourd’hui, nos ressources en bénévoles étant limitées, Michel sent qu’il faut maintenant passer à l’action, d’où l’idée de suivre les pistes proposées par ce chantier.
Beaucoup d’entre nous sont sur le terrain et, face aux difficultés, nous souhaitons échanger nos expériences, vérifier nos idées et nos pistes. Face à un défi nous devons pouvoir aller rechercher les ressources qui existent et qui sont très riches.
Notre diversité est faite de parties communes et de différences. Il ne faut pas mettre nos différences sous le tapis mais les identifier, ne pas les regarder comme des dangers mais au contraire comme des richesses. Pour chacun des trois groupes (ou axes : axe 1 : « Quelles ressources spirituelles face aux défis actuels ? », axe 2 : « Quels mots pour dire le spirituel ? », axe 3 : « Le spirituel : un bien commun ? ») du chantier, a été produit un résumé de quelques lignes ainsi que 5, 10, 15 pages sur ce que nous partageons en commun, puis avec des témoignages (écrire ce qui a été produit est primordial).
Dans ce chantier et le colloque-action du 1er février qui a suivi, il y avait des personnes de nos profils, qui, sur le terrain, sont en train d’animer des groupes interreligieux, inter-spirituels, inter-convictionnels. Ces 70 personnes ont vécu le fait qu’il y avait pour eux un enjeu commun, une « coresponsabilité sociétale ». La première chose décidée a été d’avoir une rencontre annuelle : vous êtes invités, ce sera le 1er février 2026. Les ateliers de ces rencontres annuelles seront les sujets qui préoccupent les acteurs que nous sommes. Des ateliers ont été identifiés actuellement, mais il peut y en avoir d’autres. Nous souhaitons travailler en réseau et dans l’échange d’expérience.
Michel présente des outils issus du chantier. Cela fait d’ailleurs sens d’adapter les outils dans les situations de chacun et d’en rendre compte.
- Questionnaire sur la spiritualité. Soit en groupe, soit de manière bilatérale les différentes personnes le remplissent et ensuite on le relit ensemble. Il y a une progressivité dans les questions posées. Moyennant une règle éthique de confiance, l’expérience montre que ce questionnaire est un accélérateur pour entrer en relation. Ce questionnaire peut être répondu en deux phases successives (questions de base, puis questions pour approfondir).
- Questions croisées. Cela aide à dépasser le côté « poli » de la relation
- Des mots proches de spiritualités . Pendant le dialogue interconvictionnel, il est indispensable de commencer par reconnaître le mot que l’interlocuteur utilise pour dire sa soif de spiritualité : humanisme, sagesse, éthique, bonté, philosophie, etc. Dans le document de cet outil, il y a sept fiches répertoriant pour chaque mot ce qu’il a en commun avec la spiritualité, et aussi les différences. L’objectif est que ces mots proches soient un outil de dialogue, de complémentarité et de richesse pour tous au lieu d’être créateurs de peurs.
- Les spiritualités, la spiritualité, le spirituel. Quels cheminements ? Des jugements émergent rapidement quand on parle du spirituel : « c’est du syncrétisme, le grand dénominateur commun ne veut rien dire, c’est de l’attrape tout ». Comment bâtir ensemble un cheminement qui part de la multiplicité et de la richesse des spiritualités pour comprendre ce que veut dire le spirituel, la vie spirituelle. Qu’a-t-on en commun ? Quatre pages proposent des points de repères.
Quatre actions ont été décidées à l’issue du colloque du 1er février, ( parmi les sept envisagées: Mettre en œuvre une formation à l’animation de groupes interconvictionnels, Créer un événement annuel d’échange d’expérience au Forum104, Ouvrir la richesse des activités du Forum à ceux qui n’y ont pas naturellement accès, Développer une approche ludique des ressources spirituelles face aux défis actuels, Approfondir les travaux thématiques du chantier de 2023-2024, Faire un travail de prospective et d’espérance, Étudier la faisabilité d’une base de données sur les ressources spirituelles face aux défis actuels).
- Une rencontre annuelle (la prochaine est le 1/2/2026, comme indiqué plus haut).
- Une formation à l’animation de groupes interconvictionnels , sur la base de la richesse des expériences vécues. Coexister est intéressé. On va monter cette formation avec les personnes intéressés et pour elles. Trois fois dans l’année, on prendra les sujets difficiles que l’on traitera sur le fond, et on capitalisera l’expérience acquise (résultats présentés le 1/2/2026).
- Un travail interconvictionnel de prospective sur l’espérance , avec des professionnels prêts à travailler avec nous. La Société Française de Prospective met trois experts à notre disposition, dans le cadre d’une demi-journée trimestrielle d’approfondissement de ce sujet.
- Une approche ludique . Il s’agit d’un jeu de l’oie à fabriquer, avec quelle ressource spirituelle en face de tel ou tel défi, pour favoriser un dialogue interconvictionnel.
Tous ceux qui sont intéressés peuvent avoir accès à ces actions. Tous les mois environ, un message est envoyé à ceux qui ont souhaité être tenus au courant de l’avancement. Et rendez-vous au 1er février 2026 pour partager ! Mais d’ici là des réunions de travail auront lieu, sachant que le présentiel est privilégié pour ces sujets qui touchent à l’essentiel.
Ghaleb BENCHEIKH, président de CMRP-France

Ghaleb réfléchit sur le titre de notre table ronde.
On a parlé de « dialogue des spiritualités » pour ne pas parler de dialogue des religions, dialogue des cultures, dialogue des civilisations. En fait ce sont toujours des hommes et des femmes appartenant à des aires civilisationnelles, ayant des cultures, se reconnaissant dans des appartenances confessionnelles, qui disent « j’ai telle ou telle spiritualité ». Le dialogue est toujours inter-individuel.
L’expression « faire société » date du tournant du 19ème siècle. Mona Ozouf (1868-1951) parle de « faire société avec les âmes ». Le journal Le Monde note un pic dans son utilisation en 1953, puis en 1965 (rapport avec “Nostra Aetate” ?) mais ensuite elle est davantage utilisée depuis les années 1990. Elle remplace un peu l’expression « le vivre ensemble ». Cette expression « vivre ensemble » est d’ailleurs contestée de nos jours : nous sommes ensemble, mais peut-être dans la défiance, le repli, la crispation au lieu d’être dans une symbiose, une synergie, une volonté commune d’asseoir les fondations d’une société fraternelle, prospère, solidaire, juste pour tous !
L’articulation entre les deux est le sujet de cette table ronde. Notre monde ne va pas bien, c’est une réalité amère, avec ces fractures auxquelles nous assistons tous, et nous n’arrivons pas à ne pas être dans la surenchère. Or c’est un débat serein, où l’on ne condamne pas a priori la proposition d’autrui, qui porte des fruits ! Ghaleb cite l’imam al-Shāfi’ī (mort en 820) qui disait que, dans une controverse, « mon avis, je pense qu’il est juste par construction, mais je n’oublie jamais qu’il recèle sa part d’erreur, alors que l’avis de mon contradicteur, je pense qu’il est faux, mais je n’oublie jamais sa part de vérité ». C’est ainsi qu’il y a une éthique du débat et de la rencontre. Et ce pour aboutir à quelque chose, en ce qui nous concerne, c’est faire société, une société de justice pour tous, du bien commun, dans l’intérêt général.
Ghaleb fait l’analogie avec la musique. Pour atteindre une belle symphonie des spiritualités, il faut des instruments. Ces instruments sont le fait de s’enraciner dans une tradition religieuse. Plus on s’enracine, plus on a la capacité de s’ouvrir à autrui.
Laurent Landete, directeur du Collège des Bernardins, écrit dans la préface de son ouvrage «Les religions font-elles plus de bien que de mal » qu’il faut éviter deux types de langue (la langue de bois et la langue de coton) et en privilégier une troisième (la langue de chair). La langue de bois est largement utilisée par les hommes politiques ! La langue de coton correspond à un dialogue aseptisé, convenu : il ne faut pas évoquer les questions qui fâchent !
Par contre la langue de chair, une langue incarnée, révèle l’authenticité du témoignage, la sincérité du témoin lui-même qui ne cherche pas à convertir, mais simplement à témoigner au moins sur deux aspects :
- lever les confusions (donner aux mots leur véritable sens, et il y a eu une confusion terrible entre le religieux et la religion : le religieux est à la religion ce que la grammaire est à la sémantique) ;
- expliquer que les choses ne sont pas si simples en ces temps de réflexion en silo où les personnes se croient dépositaires de la vérité en s’appuyant sur les réseaux sociaux.
Sur ce deuxième aspect, la réaction fuse :
- cet interlocuteur est en train de noyer le poisson, il faut s’en méfier ;
- ou encore cela relève de la naïveté, continuer à parler de rencontre n’est que de la candeur crédule, ce n’est pas possible, on ne va pas se laisser marcher sur les pieds ; c’est le grand remplacement, notre identité est atteinte ; on porte atteinte à la pureté de ma religion mon bien le plus précieux.
Et si par hasard on ne veut pas répondre à ces deux types de réaction pour éviter de surenchérir, on a le retour « Ah il esquive le choc du sujet, il faut en découdre ».
En fait on ne peut témoigner que par une manière d’être. Nous qui ne sommes que de passage sur terre, conscients de la finitude, de nos petitesses, de la mort, de nos fragilités, nous devons aller à l’essentiel, et c’est là que le mot spirituel a son véritable sens. Nous aurons à rendre compte de notre jeunesse, nos connaissances, nos biens. Comment avons-nous passé ce temps sur terre : est-ce pour asseoir ces fondations d’une société commune, d’un destin commun élargi à l’humanité toute entière sous la voûte céleste ? Ce n’est pas du relativisme ou du syncrétisme, c’est une conviction profonde qu’il faut vivre avec une altérité apaisée.
Il y a lieu d’avoir l’intelligence du cœur d’accueillir autrui, de se découvrir pour l’accueillir : ce sont nos spiritualités qui nous le disent. Ghaleb trouve des trésors en lisant l’encyclique Fratelli tutti du Pape François, même s’il ne cautionne pas tel ou tel aspect.
Quand on se rend compte combien la vie, qui nous est donnée, est précieuse, à quoi bon s’écharper sur ce qui est finalement futile ! Aucun groupe humain (nation, peuple, communauté, …) ne change si pris individuellement les membres de ce groupe n’entreprennent pas une conversion intérieure, en se réveillant à l’essentiel, être capable d’aimer son semblable ou de ne pas faire à autrui ce qu’on n’a pas envie de subir.
C’est une règle dans toutes les traditions religieuses. C’est aussi ce que nous ont enseigné nos maîtres et philosophes au cours de l’« âge axial » (de 800 à 200 av. J.-C.). Pour se tenir à cette « règle d’or », il faut y être éveillé, pouvoir s’y préparer par l’éducation, la connaissance intérieure, et en laissant place à l’amour puissant, éternel, transnaturel ( le concept de « transnaturel » exprime le caractère instable d’un être appelé à la vie surnaturelle) qui nous lie et dont nous aurons à rendre compte au soir de notre vie avec la seule question qui vaille : «Qu’as-tu fait de ton frère, l’homme, l’être humain ? ».
Dans notre pays, sous la voûte commune de la laïcité, il y a l’intuition de Jean-Baptiste de Foucault de l’interfécondation entre la démocratie et la spiritualité. La démocratie n’est pas juste que 51 % des citoyens (ayant donc la majorité) peuvent faire ce qu’ils veulent : il y a une éthique derrière qui doit être fécondée par des spiritualités qui elle-même acceptent le pluralisme, sinon elles s’atrophient et dégénèrent en radicalisme, en extrémisme.
Echanges avec la salle

Question : Grégoire demande comment les religions peuvent reprendre leur place par rapport aux spiritualités non religieuses dans notre société d’aujourd’hui ?
R. (Michel) Il y a le contexte du Forum104 et le contexte général. Dans la mesure où les religions officielles avaient déjà des lieux, les nouvelles spiritualités se sont retrouvées investir plus spécialement le Forum104 qui leur était ouvert. Cela a demandé au Forum104 un certain discernement pour éviter d’accueillir des spiritualités à tendance sectaire. Dans le chantier a été expérimenté le fait que le travail interconvictionnel approfondi suscite en chaque personne un enracinement, une solidité dans sa propre tradition.
Au niveau de la société, il y a à la fois des forces vives dans certaines grandes traditions et en même temps une instrumentalisation des religions qui sont des contre-témoignages massifs. On peut dire qu’aujourd’hui c’est une guerre hybride, la manipulation des religions est devenue d’une efficacité redoutable !
R. (Ghaleb) Le fait que le mot « spiritualité » passe mieux que le mot « religion » est un des effets de la sécularisation.
Depuis 1905, cela s’est calmé mais le vocabulaire s’est adapté. On n’osait plus parler de Dieu, on parlait de transcendance. On n’osait plus parler de religion, on parlait de spiritualité. On n’osait plus parler de charité, on parlait de solidarité. On disait que la question religieuse n’avait pu offrir que des tracas ; les doctrines des religions étaient irrationnelles ; oser parler de religion était devenu archaïque …. Et patatras, il y a l’histoire du voile à Creil, des rivalités selon l’appartenance religieuse… et le sujet de la religion revient !
Néanmoins des croyants ne se retrouvent pas dans l’image perçue et que certains de leurs adeptes en donnent.
Mais les opposants leur répondent « c’est le côté spirituel que vous représentez, ce n’est pas la religion elle même qui, elle, broie l’être humain ».
Ghaleb cite le triptyque, présenté en anthropologie du fait religieux, une approche ternaire de la religion : Religion force, religion forme, religion offrant un cadre pour une expérience humaine du sacré. C’est le dernier volet de ce triptyque qui est mis en avant lorsqu’on parle de spiritualité.
R. (Michel) Il est dans la nature de la spiritualité de ne pas se laisser enfermer même dans une définition. Le chantier a dit « Regardons ensemble où les spiritualités prennent leur racines (en commun) » et la réponse fut : « Tout le champ des relations, tout le champ des limites, tout le champ de la quête de sens ». Ensuite on a regardé les effets de la spiritualité.
Question / commentaire : Jean-Marc, engagé dans Saint-Merry Hors-les-Murs, considère que l’éducation à la spiritualité et l’intériorité est en friche à l’école. L’enseignement des faits religieux est pauvre. N’y a -t-il pas un chantier énorme par rapport à ce sujet ? Les traditions religieuses peuvent apporter une ouverture éducative, même s’il y a eu dans l’histoire des périodes d’affrontement. La France aurait intérêt à regarder ce qui se passe de l’autre côté du Rhin où ce sujet n’est pas tabou.
Question / commentaire : Claude, engagé dans CCFD – Terre solidaire, décrit l’évolution de la perception par cette association du moyen de s’attaquer au problème de la faim dans le monde. Au départ il y avait une urgence (une partie de l’humanité meurt de faim) mais il faut du temps pour la résoudre, c’est « le développement » qui a été inscrit dans l’intitulé de l’association CCFD. Ensuite clairement ce développement ne devait pas être apporté de l’extérieur et le partenariat avec des acteurs locaux est apparu fondamental. L’objectif ne devait pas être perdu de vue : mieux vivre dans une humanité réconciliée, ce qui rejoint l’objectif du chantier. Claude souligne aussi l’importance des silences : faire halte pour se rendre compte du chemin parcouru et de ce qui reste à faire.
R. (Hamdam) Par rapport au temps long, comment ne pas perdre espoir, garder sa motivation, quand on est sur des sujets comme lutter contre la faim, recréer du lien, etc. ?
Hamdam rapporte une fable. C’est un village de pécheurs où les bateaux échouent. Un premier groupe de villageois vont sauver les personnes qui sont en train d’échouer. Un deuxième groupe s’active à côté, on ne sait pas trop à faire quoi. Le premier groupe leur dit : «Vous voyez bien que des personnes sont en train de se noyer ! ». Le deuxième groupe répond : « Bien sûr c’est important ce que vous faites, mais nous construisons le phare qui permettra que plus aucun bateau ne s’échoue. ».
Ce travail sur le temps long nous permet de garder espoir, de savoir que ce qu’on fait est indispensable pour une transformation en profondeur, un changement des comportements.
Question / commentaire : Jean-René, Compostelle-Cordoue, Ensemble avec Marie. Nous sommes dans des processus qui transforment l’altérité en familiarité, l’ignorance en connaissance. Familiarité ne veut pas dire être d’accord, mais le ciment de la société est cette transformation en « famille ». Le danger est d’en rester là, comment passer à l’étape suivante avec ceux qui sont encore à l’extérieur ?
Question / commentaire : Mehmet, engagé depuis quelques décennies. Ce que vous faites est très important et peut apporter la paix et la prospérité dans le monde. Il faut utiliser l’arme de la parole.
R. (Michel). Les défis aujourd’hui augmentent. Les ressources spirituelles présentent de grandes richesses pour faire face à ces défis.
D&S a publié une collection d’ouvrages sur le sujet, en particulier le livre « Des raisons d’espérer ». Michel conseille en particulier le quatrième livre qui va sortir de cette collection « Logique de pouvoir et éthique» écrit par Jean-Baptiste de Foucault qui a fondé D&S. Par rapport à la laïcité, un groupe de travail a produit le livre « Laïcité et spiritualité » également dans cette collection.
L’époque actuelle nécessite que l’on apprenne à prendre du recul pour pouvoir avoir du discernement et ne pas tomber dans les pièges des instrumentalisations idéologiques.
Michel propose
- d’avoir confiance dans ses intuitions spirituelles qui émergent à certains moments (et que l’on a tendance à balayer, par déni de ce qui nous arrive) ;
- d’oser passer à l’action aujourd’hui, même si ces actions sont imparfaites (l’expérience du chantier a montré que c’est sur le front qu’on apprend vraiment) et tenir bon (exemple du maintien de l’amitié judéo-musulmane et plus généralement l’action des groupes locaus interreligieux après ce drame du 7 octobre 2023) .
Michel termine par deux citations :
- Eric Vinson « Le spirituel, une dernière chance pour l’humanité aujourd’hui ? »
- Paul Valéry «Le vent se lève !… Il faut tenter de vivre ! » (Michel fait la comparaison du « vent » avec le « souffle spirituel et avec la bourrasque de certains chaos qui se lèvent actuellement…»)
Conclusion de la journée

Ghaleb remercie Hamdam d’avoir animé cette table ronde, Michel d’avoir témoigné avec beaucoup de conviction de ce travail mené au sein de D&S, et toute l’assistance, dont certains sont venus de loin, sans oublier ceux qui ont suivi à distance en visioconférence.
Et Ghaleb conclut :
« Le Forum104 permet d’être la catalyse de toutes les bonnes volontés qui œuvrent dans le champ du dialogue interconvictionnel, spirituel, interreligieux.
« Nous pouvons être pris par le doute devant l’immensité de la tache, mais au moins nous ne sommes pas complices par l’inaction et le silence de ceux dont je pourrais dénoncer les méfaits par ailleurs. Chacun à son niveau essaie d’agir. Je suis toujours fasciné par ceux qui donnent de leur temps, de leur énergie : le monde s’il tient, c’est aussi parce qu’il y a des engagements de cet ordre. »
Henri et Jean-Luc ont eu l’idée d’associer D&S et CMRP-France pour cette journée, comme les deux ailes d’un partenariat, et nous avons passé une bonne journée.
Ghaleb rend hommage aux jeunes amies de Tonalestate qui sont présentes cet après-midi et qui organisent chaque année une Université d’été internationale, dans les Alpes italiennes. CMRP-France a été représenté par Ghaleb à l’édition 2023 de cette université d’été sur le thème de la dignité humaine. L’Université d’été 2025 sera sur le thème de ceux qui sont abandonnés dans notre société (de Relicti en italien).
Ghaleb termine avec les projets pour l’année prochaine.
- Vous êtes tous conviés à la rencontre annuelle du chantier le dimanche 1er février 2026.
- Nous avons le 40ème anniversaire de la fondation, par Jacqueline Rougé de la section française de Religions pour la Paix, et nous lui ferons appel, ainsi qu’à Mgr Matthieu Rougé pour le célébrer.