Entrée en Shabbat – Colloque Saint-Jacut-de-la-Mer Janvier 2007

Abbaye Saint-Jacut-de-la-Mer

Plus de 200 personnes se sont rassemblées à l’Abbaye, du 12 au 14 janvier 2007, pour le traditionnel colloque inter-religions.

Entrée en Shabbat
par Philippe Haddad
Vendredi 12 janvier 2007

« Et l’Eternel bénit le septième jour et Il le sanctifia car par lui Il cessa toute Son œuvre qu’Il avait créée  » (Genèse / Béréshith I, )

Le vendredi soir nous entrons en Shabbath, et le samedi soir nous sortons du Shabbath. Telle est la terminologie traditionnellement utilisée. Les verbes entrer et sortir sont habituellement employés pour l’espace. On entre dans une maison, on sort d’une boutique.

Entrer ou sortir d’un jour, d’un temps particulier, peut paraître plus surprenantt. C’est que le Shabbath appartient aux expériences spirituelles du judaïsme comme il en existe d’aussi intense dans le christianisme ou dans l’islam ; comme il en existe dans les spiritualités du monde entier, d’hier et d’aujourd’hui.

Entrer en Shabbath, de ce point de vue, c’est sortir de l’espace fini pour pénétrer dans un temps infini. Les bornes que constituent l’heure d’entrée et l’heure de sortie ne sont que des trompes l’œil. Les mathématiciens nous ont appris que dans l’ensemble des réels (R), entre deux nombres finis, il peut exister l’infini des nombres.

Toute expérience religieuse et spirituelle invite à sortir des cadres habituels, toute expérience religieuse et spirituelle propose de l’étonnement, de la surprise, le renouvellement de notre regard sur le monde, et donc de notre être au monde.
Pendant l’expérience spirituelle rien n’est comme avant, et après l’expérience spirituelle rien n’est plus comme avant.

Réunis ensemble dans cette abbaye de fraternité, nous, juifs, chrétiens et musulmans, hommes et femmes de foi et de bonne foi, en chemin de Dieu, nous pouvons nous laisser porter par cet étonnement, prélude à l’authentique rencontre.

Demain dans toutes les synagogues du monde, commencera la lecture du deuxième livre de la Torah, du Pentateuque, le livre de l’Exode, Shémoth, le livre des Noms. Nous y lirons l’épisode du buisson ardent, la première expérience spirituelle de Moïse. Moïse fut étonné qu’un buisson recouvert d’une flamme ne se consume pas.

Moïse connaissait l’expérience de la force qui dévore, de la force qui brûle, de la force qui décrète l’esclavage des hommes et la noyade des garçons nouveaux-nés. Mais Moïse ne connaissait pas l’expérience de la force qui retient sa force, la force de Dieu. Car la force de Dieu brille sans brûler, éclaire sans aveugler, réchauffe sans détruire.

De ce rapport de Dieu au monde, le midrash enseigne :  » La où tu trouves la grandeur du Saint, béni soit-il, là tu trouveras son humilité « . Pour la Bible, la puissance ne se trouve pas dans la capacité d’écraser, mais dans la capacité de se retenir pour que l’autre soi. En ce sens l’humilité n’est pas faiblesse, mais triomphe sur soi-même, en ce sens peut-elle être attribué à cet homme puisant,  » l’homme Moïse, le plus humble des humains sur la surface de la terre. « 

Telle est la texture de l’expérience spirituelle, non pas une expérience où les identités se dissolvent, une expérience où les identités se confondent, mais une expérience où les êtres vivent les uns près des autres, parce que l’un laisse une place à l’autre.
Alors, sans doute, l’expérience spirituelle révèle sa vraie nature, puisqu’elle se conjugue avec la paix, salam, shalom, qui est le nom de Dieu.

Shabath Shalom
P.H

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